Catégories
Protection de l' Enfance

Malaise en protection de l’enfance

L’ASE est mise à mal. 

Les TS y souffrent, les défections se multiplient. Le public concerné « exporte » sa souffrance… 

Justice, éducation spécialisée, santé mentale la société semble mettre la poussière sous le tapis, quand s’impose de la transversalité.

Le DRHwashing ne traite rien, les revendications n’apaisent pas, le public diversifie et amplifie les « symptômes », ce qui le conduit au TE  et à l’UT…

Édouard Durand, JE, dans Enfance et jeunesse infos titre : « Le plus grand aléa dans la protection de l’enfance est la subjectivité des professionnels »

Mes activités en guidance familiale m’amènent à accompagner des familles avec leurs TS.

Comme formateur, superviseur je chemine avec des services les plus variés de la Protection de l’Enfance, j’y pense et  je panse les carences institutionnelles qui expriment des difficultés liées à l’équation personnelle des personnes missionnées par ces institutions. Elles échappent à l’une de leurs missions essentielles. Offrir à leurscollaborateurs.trices une « équipe ».

Équiper le TS est la tâche première de l’institution. Celle d’apporter à ses  collaborateurs la « contenance » minimum et indispensable dont ils ont besoin par essence même de la relation d’aide. Elle nécessite qu’elle soit soumise à un regard « tiers ». Les TS, esseulés dans leurs activités, y agissent sous l’égide de leur subjectivité, ils courent le risque de l’auto-référencement. Et c’est donc bien à un « arbitraire » qu’est confronté le public. 

Ce constat est « normal » et il est d’ailleurs le bienvenu si et seulement si l’équipe qu’on lui offre pratique une culture d’équipe où s’exerce de façon circulante cette nécessaire « tiercité ».

Je peux voir de toi ce que tu ne peux voir de toi (et inversement) et je t’en fais « cadeau ». 

Je m’interdis de te regarder t’abîmer dans ta fonction et je t’offre cette « confrontation » qui peut t’aider à te protéger et qui préserve le public d’être conduit, dirigé, accompagné dans des attitudes chargées de tes projections bien inconscientes. On te les pardonne d’autant plus que c’est inévitable. C’est de ces silences, de ces rétentions de « cadeaux » que s’abîme le personnel. Créer cette culture d’équipe courageuse et bienveillante est la première tâche de l’ASE. Il s’agit là d’une tâche essentielle du chef de service qu’il convient de former et de soutenir à son tour dans cette expertise qui fait passer son équipe de l’action éducative à la clinique éducative. Le CG, son employeur le formera donc, au-delà des compétences techniques, à créer et entretenir cette culture d’équipe qui fait du prendre soin d’elle-même sa tache première. Seule approche qui permet d’aller au-devant d’une famille, d’un jeune… sans lui faire courir le risque que les aléas évoqués n’envahissent la relation d’aide. Sans cette précaution, le risque est trop grand que l’aide nécessaire génère de la rébellion et/ou de la soumission. Dans les deux cas, le pouvoir d’agir du public est disqualifié. Et voici que l’institution, parce qu’elle n’a pas géré sa mission première « d’équiper son personnel », répond aux invitations homéostasiques du public… qui se défend.

J’invite donc à penser que panser se fera par phénomène de cascade. 

Là, j’invite à professionnaliser le travail d’équipe. Il ne suffit pas de créer une ambiance sympa… c’est mieux, mais insuffisant. Cela fait courir au public le risque d’être soumis à l’auto-référencement du TS.

L’ASE, si elle veut changer de route, doit  former ses cadres. Elle doit soutenir un changement de culture d’entreprise qui reconnaît, soutient ces priorités. J’observe une mobilisation sur les conditions contractuelles, sur les référentiels, les procédures que l’on tente d’implémenter avec le soutien de chercheurs. Cela ne sera utile que si le « care » des équipes se développe à l’égard des collaborateurs pour que percole sur le public le prendre soin qu’il est en droit d’attendre…mais qu’il repousse aujourd’hui parce qu’il ne perçoit pas suffisamment combien le TS est prêt à « mouiller sa chemise », réfugié derrière des concepts rationnels telle  la « bonne distance »…. qui n’est en fait qu’une armure. 

La porte visée est sans nul doute l’épanouissement des professionnels. L’ambition est une fidélisation des référents, elle-même condition d’une souhaitable permanence dans les interventions. Nombreuses sont les situations qui dénoncent l’intervention d’un trop grand nombre d’intervenants.

La porte piégée est l’excès d’enquête, d’évaluations, de recherches et d’options limitées à des dispositions DRH. L’expression des doléances du personnel est trop souvent asphyxiée par les enquêtes pilotées par des labos de recherche et des bureaux de consultance qui n’apaisent pas.

La porte d’entrée est, ici, du registre des émotions, des sentiments. Celui de participer au « prendre soin » de l’équipe. Cela nécessite de travailler à une culture institutionnelle qui cultive le « Moi, d’abord ».

Il s’agit là du premier pas dans une éthique du soin. C’est, comme dit plus haut, la condition nécessaire pour protéger les interventions auprès du public avec le moins possible d’auto-référencement, de « résonances » qui priveraient les familles, les jeunes de l’exercice de leur « pouvoir d’agir », les confirmant ainsi dans la soumission ou la méfiance à l’égard du TS.

Une qualité de croisement de regards, d’exercice d’une tiercité circulante dans l’équipe qui prévient des risques de pollution des familles du public et de celles des TS, par les « croyances ».  Cela fonctionne pour autant que l’équipe s’approprie la mission d’accompagnement, soucieuse de ne pas laisser son équipier, isolé, dans un face à face perdant/perdants où couve le burnout et le repli stratégique de la famille qui solidifie ses remparts.

Je parle ici des devoirs de l’institution à l’égard de ses collaborateurs, et de l’engagement de ceux-ci dans une culture d’entreprise qui fait de la commission enfance un lieu de métabolisation des craintes et inquiétudes, des transferts et contre-transferts,   des résonances l’accompagnement de familles dites « dysfonctionnelles ».

Luc Fouarge

La tâche prioritaire de l’institution de protection de l’enfance

Si l’intervenant psychosocial n’est pas triangulé par son équipe, son institution, une supervision…, l’aide pourrait bien représenter un risque contre lequel les familles se battent avec toutes les maladresses que l’on devine. Et voilà qu’ainsi, la famille elle-même, conforte la représentation que s’en était faite le TS. Ainsi, en ASE, la durée de placement devient abusive, démobilisante sur le plan familial et génère des passages à l’acte ravageurs d’ados. Et ce même TS finira épuisé faute d’avoir été « confronté » sainement par son équipe, par son institution… C’est ici que démarre le « care ».

…il y a tant à faire, que ce travail de soins des équipiers de la commission enfance, passe bien loin après les taches quantifiables…la quantophrénie bouffe le temps réservé aux intervenants. Ils iront voir ailleurs… car le travail cesse d’être un job de l’humain… 

je me répète… je rencontre tant de placements qui ne sont plus justifiés… et il manque tant de places

En arrière-fond, la responsabilité de l’institution vis-à-vis de phénomènes bien documentés ; résonance, contre-transfert, invitation symbiotique… rien de plus normal et dont les forces limitantes s’amenuisent lorsqu’ils s’offrent à être vus, à être commentés dans la bonneveillance dans l’équipe. Ainsi le champ de vision de chacun s’élargit, le jeune et sa famille sont protégés de ce qui pourrait devenir « la sauvagerie » du travail psychosocial

Luc Fouarge

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.