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IMP 140 Société

Lobotomisation émotionnelle en service résidentiel

Quand l’institution se débat contre …. ?      

Les équipes qui accompagnent ces personnes dénoncent des pratiques managériales quasi répressives. Au moindre malaise ils sont changés de poste, les cadres « (b)analysent » ils mettent au ban toutes tentatives du personnel d’éclairer les mal-être qui les rongent, contrôlent jusqu’à l’interdiction les moments de regroupement de leurs professionnels, agissent, font obstacle à toute velléités d’attachement de ceux-ci à l’égard des personnes accueillies… bref des conduites qui font émerger des sensations d’être mis à mal dans un système sectaire. 

L’empathie, bien qu’intellectuellement promue, n’a pas le temps de s’installer, elle est même déviée, évitée au nom de pseudo valeurs, ou de valeurs toxiques : il ne serait pas bon de s’attacher. Une projection identificatoire de la sphère hiérarchique…sans doute ?

Comme si les rênes étaient au mains de personnes à la veille de subir le principes de Peter et de se retrouver le lendemain déshabillées de leur participation à la fonction dirigeante. 

Une institution qui manifeste les symptômes des angoisses « cachées » de ses cadres. Une interprétation de l’ « exportation » des émotions, système inconscient qui amène les équipiers à ressentir les émotions retenues, cachées.

Ils s’agit pourtant d’inquiétudes normales de ces tâches de direction mais qui sont tues et qui conduisent à l’épuisement.

Dans ces services, l’absentéisme est si important qu’il s’érige en système. Le CM devient la manifestation des inquiétudes qu’on ne peut dire, l’institution y répond en attendant le dépassement d’un mois pour faire une embauche, d’une personne qui sera par sa jeunesse dans le métier « invitée » à se mouler dans le dysfonctionnement institutionnel.

Tout cela est très, tristement, humain mais devrait être lu, entendu comme un objet de travail institutionnel bienvenu…à la place de cela, il suscite des mécanismes de défense.

On entend évoquer la division, le sentiment d’être sous conduite sectaire…bref des ressentiments qui s’accumulent et creusent le fossé entre les besoins d’efficacité des cadres et les besoins de soutien, de cohésion et de reconnaissance des personnels.

La peur est le sentiment dominant et l’autodestruction, le burnout la réponse. Cette maladie de la « chefferie » est un classique qui est trop peu questionné dans la lecture des symptômes qui s’accroissent dans ces services.

Les opérations de « qualitarisme » et de « quantophrénie » viennent au secours, l’énergie est recentrée sur les rapports administratifs qui servent de mesures aux logiques gestionnaires que les directions amplifient quand les émois se font trop sentir.

Les évaluateurs externes ne peuvent en prendre la mesure, aveuglés qu’ils sont par un sentiment, illusoire,  d’une saine productivité des professionnels. 

Héritage des communautés religieuses qui géraient auparavant ces même services. La soumission faisait partie intégrante du choix de s’en remettre à Dieu. La dévotion était la mesure de la réussite d’un diktat généreux applaudi par toute la population soulagée des personnes en souffrances physique et psychique dans de jolies zones arborisées sous le règne de la générosité des dons. 

Cette dispense, cette interdiction, d’utiliser l’émotion du personnel, comme paramètre, indicateur diagnostic pourrait faire symétrie avec la soumission des personnes qui cherchent à s’accommoder du handicap et de la vie en collectivité. La scotomisation, la mise de côté des émotions laisserait apparaitre un lieu de vie aux apparences lisses. La crise de conscience qui précède la prise de conscience et elle-même la créativité, l’acceptation de la réalité, la création de conduites qui permettent de cultiver la dignité et l’image de soi positive s’évanouit. Dans ces difficultés, la métabolisation de la crise avorte, réprimée par des escalades dites éducatives.

Construire un management qui se met au service du projet de service passe par une réflexion sur le style de leadership qui épanouit tout à la fois personnels et personnes.

Une réflexion permanente qui appartient tant aux responsables qu’aux membres du personnel. Un style autoritaire qui sauve des vies à l’armée étouffe le désir, la création dans ce type de communauté. Les exigences de performances, les modalités de subventions et d’évaluation sont utilisées pour s’abstenir de  ces nécessaires rencontres humaines. Si elles deviennent objet d’un travail collectif, elles rompront avec ce climat au service de l’homéostasie, au service du non-changement.

Réprimer n’est pas contenir. Contenir c’est accueillir l’émotion, le désir, les envies homicidaires et suicidaires sans fuir. C’est amener à la parole des instants  indicibles. Retenue, elle débouchera sur de la violence sur autrui et/ou sur soi. Des débordements que l’ «encadrement » ne suffit pas à endiguer. La parole prévient l’enfermement dans un monde irréel et la mise en acte. 

Cette parole ne peut advenir que si le personnel apparait en capacité de l’accueillir. Cela suppose qu’il puisse régulièrement bénéficier de ce lieu et ce temps de métabolisation des ses propres inquiétudes auxquelles on attribue une valeur précieuse pour comprendre la personne, l’aisance et l’assurance que le personnel tiendra sa place face aux dires parfois insoutenables… particulièrement s’ils touchent au résonances.

La présente réflexion interroge les qualités du personnel de direction qui tend à privilégier les logiques de bonne gestion économique et de productivité. Dans la foulée il est tout autant précieux de questionner le rôle des organisations représentatives tant des personnels que des employeurs. De telles démarches constructives aboutiraient si elles étaient menées avec le personnel des services d’audit (ne dites plus inspection) des administrations qui subventionnent ces services destinés à l’épanouissement maximum des personnes qui dans la vie ont à faire à des obstacles majeurs pour participer à la vie sociale.

Bien sûr, ne généralisons pas ces dysfonctionnements. Mais ne faisons pas l’économie de cette lecture dont je peux vous assurer qu’elle n’est ni fiction, ni du siècle passé. 

Luc Fouarge

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